Ils ont voté pour Nicolas Sarkozy avec la conviction qu'entre les deux candidats, "face à la crise, il n'y avait pas photo". Dimanche 6 mai, Alain et Noëlle Rauscent ont simplement "pris acte" de la victoire de François Hollande. Alain Rauscent est éleveur, sa femme est maire de Domecy-sur-Cure, un village au pied de Vézelay, dans l'Yonne.
Tous deux ne sont pas vraiment surpris par les résultats de cette élection présidentielle. Lorsqu'on les avait rencontrés, en février, ils avaient anticipé la désaffection du monde rural pour Nicolas Sarkozy. Noëlle Rauscent a vu grandir le sentiment d'abandon de la population de sa commune au fil des fermetures de ses services publics : la poste, la trésorerie... Des décisions souvent engagées avant l'arrivée de Nicolas Sarkozy au pouvoir. "Mais c'est à lui qu'elles sont reprochées",observe-t-elle. "Sarkozy paie l'addition pour ses deux prédécesseurs", constate Alain Rauscent.
Redoutent-ils que cette élection d'un socialiste modifie leur quotidien ? "Nous, on est habitués à travailler, on sait faire un jardin, on n'est sans doute pas de ceux qui vont souffrir le plus, assure Alain Rauscent. Celle qui va trinquer, c'est la classe moyenne qui est salariée et qui consomme. Parce qu'il ne faut pas rêver, les riches ne vont pas payer. S'ils sont riches, c'est qu'ils savent comment s'y prendre !"
Patrick Coutance, notaire à Avallon, ne vit pas non plus l'arrivée de la gauche au pouvoir comme une inquiétude personnelle. "Pour moi, rien ne va changer. Bon, on risque de me prendre un peu plus de sous. Mais je suis un notaire de province, ni très gros, ni trop petit, et je suis à l'aise." Il fait même volontiers crédit à la gauche de compter dans ses rangs des "gens de qualité, comme Jérôme Cahuzac [président de la commission des finances de l'Assemblée nationale] ou Didier Migaud [nommé par Nicolas Sarkozy président de la Cour des comptes]". Et puis, assure-t-il, "les réalités vont les ramener très vite au bons sens". Des socialistes, au fond, il redoute "moins ce qu'ils vont faire que ce qu'ils n'auront pas le courage de faire. Nicolas Sarkozy, il a fait bouger le pays, il a même brutalisé la droite là-dessus. C'est franchement l'homme qu'il nous fallait, mais ce n'est pas celui que les gens aiment. En France, au fond, on est toujours dans le même moule : Chirac, Hollande, on aime les mous, les gentils, les rad-soc. C'est ce qui fait que notre pays ne sera plus jamais leader."
Jean-Louis Groguenin, agriculteur et maire de Vignes, qui a lui aussi voté pour Nicolas Sarkozy, est tout aussi réticent. "Je crains que Hollande manque d'énergie. Mais ce qui m'inquiète, c'est moins lui que le gouvernement qu'il va nommer. J'ai une petite aversion pour Martine Aurby et Eva Joly. Et je ne sais pas comment il va s'y prendre pour faire cohabiter dans sa majorité des hommes comme Jean-Luc Mélenchon et Manuel Valls. J'avais finalement plus confiance en Mitterrand parce que lui, au moins, il avait un fort caractère."
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