mercredi 9 mai 2012

Moscovici : "Sarkozy a mené une campagne dure, il a choisi une sortie digne"


Pierre Moscovici, le 23 avril, à Paris.
Pierre Moscovici, le 23 avril, à Paris. | Reuters/CHARLES PLATIAU
Ex-directeur de campagne de François Hollande, Pierre Moscovici a été chargé par celui-ci d'assurer la "transition" entre le président sortant et le président élu.
Comment se déroule, à vos yeux, cette semaine de transition ?
Pierre Moscovici : En bonne intelligence, aussi bien que possible dans le contexte d'une alternance. Nicolas Sarkozy a mené une campagne dure, il a choisi une sortie digne. Tant mieux. Nous sommes aisément tombés d'accord avec le secrétaire général de l'Elysée, Xavier Musca, sur deux points: la participation de François Hollande aux cérémonies du 8-Mai et la date de la passation de pouvoir, le 15 mai.
La cérémonie du 8-Mai a-t-elle permis de panser les plaies de cette"campagne dure" ?
Il n'y a pas de confusion, pas de fraternisation. Le combat politique a existé, il se poursuivra à l'occasion des législatives. Et les responsables de l'UMP seront sans ménagement. Il ne s'agit pas de cela, mais plutôt d'un président élu qui a de tout temps fait de la justice et du rassemblement des Français sa priorité, et d'un président sortant qui fait passer la continuité de l'Etat avant la bataille politique dont il n'est plus, pour l'heure, un acteur. D'où une envie partagée que la transition se passe bien. Cette cérémonie commune aura été un moment apprécié de tous les Français.
Dans la transmission des dossiers, le pouvoir sortant vous facilite-t-il la tâche ?
Nous ne rencontrons pas d'obstacle pour accéder aux dossiers. C'est le signe que la France a mûri. En 1981, la droite voyait l'alternance comme une monstruosité, et la gauche n'avait jamais gouverné sous la Ve République. En 2012, la droite a toujours du mal à digérer la défaite, mais le peuple français s'est clairement exprimé et personne ne peut contester que nous avons exercé lepouvoir pendant quinze ans sur les trente dernières années.
Comment envisagez-vous la passation de pouvoir du 15 mai ?
Il y a l'installation elle-même, très codifiée. Et une dimension plus symbolique et personnelle. François Hollande y réfléchit.
M. Hollande a multiplié les contacts diplomatiques ces dernières heures. Les pays conservateurs, au niveau européen, ne l'attendent-ils pas de pied ferme?
La France est un grand pays, et le nouveau président français est terriblement attendu. François Hollande a eu au téléphone les principaux leaders mondiaux, ainsi que les chefs d'Etat ou de gouvernement des pays européens et les responsables des institutions européennes. Pour le moment, c'est une prise de contact. J'observe que les propositions de François Hollande sont au cœur du débat sur l'Europe, qui a un choix décisif à faire entre l'austérité et la croissance. Aujourd'hui, tout le monde réfléchit, avec des logiques différentes, à ce que pourrait être un agenda de croissance, et c'est nouveau. On peut manifester des accords et des désaccords, des nuances ou des distinctions. Et il faudra parvenirà des compromis. Mais l'élection française fait sans conteste bouger les lignes.
Le premier déplacement à l'étranger, une visite à la chancelière allemande,Angela Merkel, ne s'annonce-t-il pas d'emblée délicat, en particulier sur la question de la renégociation du traité de stabilité ?
Il est clair qu'il y a des différences d'approche entre les positions de la chancelière et celles de François Hollande. Mais l'expérience de ces questions montre que les choses ne se passent jamais tout à fait comme prévu. Une rencontre annoncée comme un moment difficile peut être une alchimie réussie. J'ai la conviction que c'est à la fois possible et nécessaire. Chacun est conscient de ses responsabilités: l'entente franco-allemande est un impératif pour l'avenir de l'Europe. Nos partenaires savent aussi que nos positions sont réalistes.
Vous avez été plutôt discret dans cette campagne, contrairement à Manuel Valls. Cette séquence vous permet-elle de l'éclipser à votre tour ?
Ce sont des stéréotypes ! Chacun son style, sa fonction. Nous avons travaillé de façon complémentaire et en bonne entente, ainsi qu'avec Stéphane Le Foll, à la réussite de cette campagne. Et nous continuons aujourd'hui.
Quel ministère vous ferait rêver ?
Ce que je sais surtout, c'est que c'est le président qui choisit ceux qui l'accompagnent, qui évalue leurs qualités et leurs défauts, et qui voit là où ils peuvent être le plus utiles. Mieux vaut ne pas rêver trop, mais être prêt à servir. Ça tombe bien : c'est mon état d'esprit.
Faut-il opposer un candidat PS à M. Bayrou aux législatives ?
J'ai fait connaître, après d'autres, mon sentiment: on ne peut ignorer le choix courageux et difficile que François Bayrou a effectué pour le second tour de la présidentielle. Mais c'est au Parti socialiste d'en décider.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire